Des chercheurs du Centre d’études biologiques de Chizé (Deux-Sèvres) et de l’université de La Rochelle, sous la responsabilité du directeur de recherche au CNRS Henri Weimerskirch, ont mis au point une technique inédite pour permettre la lutte contre la pêche illégale en se basant sur le comportement des Albatros.
Partant du constat que 18 des 22 espèces d’albatros sont considérées comme menacées en raison de la pêche industrielle à la palangre (au hameçon) provoquant la mort de 100 000 albatros par an, ces équipes ont pensé placer sur les Albatros des Zones Économiques Exclusives des archipels de Crozet, Kerguelen et Amsterdam des balises GPS pour suivre leurs déplacements, comprendre leur mode de vie afin de mieux les préserver. Mais en couplant la balise Argos à un détecteur d’émissions radar, l’oiseau transmet quasiment en temps réel la position des navires de pêche qu’il survole.
Croiser ensuite ces informations avec les coordonnées des navires autorisés à opérer dans la zone permet d’identifier s’ils se trouvent en situation de pêche illégale.
“Les Terres Australes et Antarctiques Françaises étant un territoire d’Outre Mer depuis 1955, la France a une responsabilité de premier ordre pour leur protection” selon le directeur de recherche.
Cinquante juvéniles et près de 200 adultes ont été équipés depuis le mois de décembre, et de nombreux échos-radar ont été détectés par les équipes.
Ouest France rapporte le témoignage d’Henri Weimerskirch :
Il y a quelques semaines par exemple, sept navires de pêche avec licence étaient dans les eaux des Kerguelen. « Les albatros les ont tous détectés. »
Un peu plus tard, ils ont aussi transmis l’écho d’un navire non identifié. « C’était la frégate de surveillance de la Marine nationale qui patrouillait dans la ZEE. »
Mais les détections de bateaux de pêche ne servent pas qu’à prendre d’éventuels contrevenants sur le fait :
« Nous enregistrons toutes les données ainsi que le flux des positions transmises par les navires pour des analyses ultérieures » explique le scientifique dont la préoccupation reste la protection de ces grands oiseaux de mer dont l’envergure dépasse deux mètres et qui sont capables de parcourir 20 000 km en deux semaines.
Comment ça marche ?
- La balise est fixée sur le dos de l’Albatros. Ce petit appareil de 60 grammes à une autonomie de 8 à 12 mois.
- La balise peut ensuite capter le signal radar d’un navire dans un rayon de 5 kilomètres.
- La localisation du navire est ensuite transmise par satellite aux observateurs qui vérifient qu’il s’agit d’un navire autorisé à naviguer dans le secteur. Si ce n’est pas le cas, les autorités sont averties et peuvent intervenir.
Sachant que cinquante oiseaux peuvent couvrir à eux seuls 10 millions de kilomètres carrés et sont capables de repérer un navire de pêche à plus de 30 km, les albatros équipés « peuvent couvrir plus de 25 millions de kilomètres carrés », avance Henri Weimerskirch.