FREMM : Le nouveau calendrier ne devrait pas être connu avant l’été

Dans le cadre des restrictions budgétaires imposées au ministère de la Défense, le rythme de production des frégates multi-missions de la Marine nationale va être ralenti. Ce glissement du programme a été acté dans la nouvelle loi de programmation militaire votée fin 2013 par le parlement.
Normalement, en 2019, seules six FREMM devraient avoir été livrées à la flotte française, au lieu des huit initialement prévues. Reste que le calendrier doit encore être définitivement acté, ce qui passe par la négociation d’un avenant au contrat signé entre l’Etat et DCNS. A ce jour, les discussions sont toujours en cours et elles ne devraient apparemment pas se conclure avant l’été.

C’est à ce moment là, seulement, que l’on connaîtra le nouveau planning de livraison des futures frégates et l’impact de l’étalement dans le temps de la production, dont la cadence devrait passer à une unité tous les 14 mois au lieu d’une tous les 10 mois. Sachant que, jusqu’en 2008, le rythme initial devait être d’un bâtiment réalisé tous les 7 mois, le programme FREMM comptant alors 17 frégates, une cible ramenée aujourd’hui à 8 unités plus 3 en option (à affermir ou non en 2016). La mise en suspens de 3 FREMM fait également partie des négociations autour de l’avenant puisque, si ces bateaux ne sont pas construits, il y aura un impact économique, ne serait-ce que pour des questions d’économies d’échelle.

Baisse de charge à Lorient

Le ralentissement et la potentielle amputation du programme FREMM va évidemment avoir des conséquences sur l’activité du site DCNS de Lorient, chargé de réaliser les frégates. Avec bien entendu des répercussions sur l’emploi, qui commencent déjà, selon les syndicats, à être palpables. Alors que l’établissement a perdu une vingtaine d’emplois équivalent temps plein (ETP) en 2013, une nouvelle réduction portant sur une trentaine d’ETP est attendue cette année, essentiellement en production. Sur un effectif global de plus de 2000 collaborateurs sur le chantier et dans les bureaux d’études, cette déflation (qui ne comprend aucun licenciement) est faible mais les syndicats craignent qu’elle s’amplifie si aucun programme majeur ne vient rapidement garnir le plan de charge. A ce titre, la situation semble plus préoccupante pour l’ingénierie. La plupart des grands projets voient en effet leurs études achevées ou entrant en phase finale, et il n’y a pas grand-chose pour prendre la relève. Afin de relancer son ingénierie, DCNS comptait notamment sur le programme des nouveaux sous-marins singapourien (projet Echo), que le groupe a récemment perdu face à l’Allemand TKMS. Idem pour les futurs bâtiments de l’US Coast Guard (projet OPC), la proposition de DCNS et de son partenaire américain VT Halter Marine n’ayant pas été sélectionnée. En attendant le développement des futures frégates de taille intermédiaire (FTI), que le ministère français de la Défense devrait lancer après 2016, des commandes à l’export sont toujours espérées, malgré les récents échecs. Reste que le nombre de grands projets internationaux potentiellement accessibles semble limité et les bonnes nouvelles ne sont en aucun cas assurées, malgré ce que l’on peut parfois entendre.

Ainsi, des politiques locaux, peut être galvanisés en cette période électorale, tentent par exemple de rassurer en évoquant une conclusion favorable d’ici 2015 du contrat géant de frégates pour l’Arabie Saoudite (Sawari III). Or, rien n’est gagné pour ce programme, qui fait depuis des années l’objet de négociations entre Paris et Ryad.  Et cette incertitude est valable, ce qui est logique, pour tout projet qui, en attendant une signature ferme et définitive, reste conditionnel.

La sous-traitance touchée de plein fouet

D’ores et déjà, le manque d’activité a, selon les syndicats, de fortes retombées sur la sous-traitance. « On se rend compte que les intérimaires se raréfient et que la sous-traitance commence à déserter le site et les bureaux d’études. Et cela va sans doute s’amplifier », explique-t-on à la CFDT. Alors que fin 2013, on comptait autour du site DCNS de Lorient, pour la seule partie production, environ 700 sous-traitants et une centaine d’intérimaires, ces derniers devraient avoir disparu fin 2014, alors qu’on s’attend à 350 ETP de moins dans la sous-traitance.
Et la situation ne devrait pas être meilleure pour l’ingénierie, qui fait également travailler des bureaux d’études extérieurs et pour laquelle on ne dispose pas de chiffre. « Nous ne voulons pas être alarmistes mais nous sommes inquiets pour l’emploi ainsi que le maintien des compétences et savoir-faire des sous-traitants, dont nous aurons impérativement besoin lorsque la machine repartira avec de nouveaux programmes. C’est pourquoi tous les acteurs de la filière doivent se réunir avec les pouvoirs publics pour faire le point sur la situation et les perspectives. Il faut, notamment, trouver le moyen de préserver les compétences sur le bassin d’emploi », estime-t-on à la CFDT. Alors que DCNS parvient dans un certain nombre de cas à trouver des palliatifs, comme le repositionnement de sociétés vers des sites où l’activité est un peu plus soutenue, à l’image de Cherbourg, certains coréalisateurs risquent de rester sur le carreau. A l’image de ce qui s’est pratiqué ces dernières années à Saint-Nazaire, la CFDT évoque par exemple la piste des plans de formations, qui permettraient d’éviter des licenciements et, au passage, renforcer le savoir-faire des sous-traitants.

Un planning à remanier

Cette situation délicate s’explique par le fait que, même si l’avenant au contrat FREMM n’a toujours pas été signé, DCNS anticipe logiquement la baisse de la cadence de production. Or, bien que certaines pistes soient prometteuses à l’export, notamment dans le domaine des frégates et des patrouilleurs, la seule chose tangible à Lorient, aujourd’hui, se résume pour l’essentiel aux FREMM françaises. Alors que la tête de série, l’Aquitaine, a été livrée fin 2012 à la Marine nationale et que la Normandie, actuellement en essais, le sera cette année, la Provence est en achèvement à flot pour une livraison en 2015. La Languedoc devrait être lancée à la fin de l’été et la FREMM 5 en 2015. Puis ce sera au tour de la FREMM 6, dont la construction a débuté en 2013 pour un lancement prévu en 2016. C’est à partir de la FREMM 7 que le cadencement moyen d’une livraison tous les 14 mois devrait être en place, sachant que l’étalement commencerait en fait dès la frégate précédente. Celle qui en est précisément, actuellement, au début de la phase de réalisation.

via MerEtMarine

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