Ces pays enclavés qui ont pourtant une Marine de guerre

Aussi curieux que cela puisse paraître, il existe dans le monde des pays enclavés, sans le moindre contact avec une mer ou un océan, et qui défendent leurs intérêts maritimes.

Selon la thèse de Ramesh Chandra Paudel publiée en 2013, il est recensé 44 pays enclavés, sans frontière maritime.

Les malheureux pays qui, désireux de prendre part à la mondialisation pour leur développement économique, ont bien compris que l’inaccessibilité aux mers du globe représente un frein à l’intégration dans les flux économiques mondiaux.

A part l’Océanie et l’Antarctique, tous les continents abritent des pays enclavés privés d’accès aux routes maritimes, contraints de transiter leurs marchandises par d’autres Etats (ce qui ne se réalise pas sans compensation), avec des réseaux de transports insuffisants, et soumis au bon vouloir de leurs voisins.

Quelques pays sans frontière maritime :

  • En Asie, 12 pays sont enclavés, dont notamment :
    • Afghanistan ;
    • Laos ;
    • Mongolie ;
    • Ouzbékistan ;
    • Tadjikistan ;
    • Népal ;
    • Azerbaïdjan.
  • Sur le continent américain, seulement 2 pays n’ont pas de contact avec la mer :
    • La Bolivie ;
    • Le Paraguay.

Ces deux Etats ont tout de même la capacité d’accéder à la mer via la rivière Rio Paraguay qui est une importante voie de transport maritime et un couloir commercial qui assure un lien fondamental entre eux et l’océan Atlantique.

  • Sur le continent européen, 13 nations sont sans frontière maritime (Vatican mis à part) dont :
    • La Suisse ;
    • La Slovaquie ;
    • Le Luxembourg ;
    • L’Autriche ;
    • La Hongrie ;
    • La Moldavie.

Tout comme le Paraguay et la Bolivie, la Moldavie peut tout de même accéder à la Mer Noire grâce au Danube, d’où l’existence de son seul port marchand international de Giurgiulești qui dispose d’un terminal pétrolier, d’un terminal céréalier et d’une gare maritime.

  • En Afrique, 16 pays sont enclavés, dont :
    • Le Niger ;
    • Le Mali ;
    • L’Ethiopie ;
    • Le Burkina Faso ;
    • Le Rwanda ;
    • Le Tchad.

A quelques exceptions près, les Etats qui n’ont aucune frontière maritime ne sont pas au premier rang des moteurs de l’économie mondiale.

Florian VISON, économiste, nous apprend que :

  • L’économie des pays enclavés représente seulement 1% du PIB global ;
  • Selon les Nations Unies, les pays enclavés voient leur PIB par habitant amputé de 20 % du simple fait de leur position géographique ;
  • Les coûts du commerce international dans les pays enclavés sont en moyenne de 30 % à 40 % supérieurs à ceux du reste du monde ;

Si le transport maritime représente 90% des échanges commerciaux dans le monde et que les océans abritent de ressources précieuses, l’accès à la mer devient un enjeu stratégique de premier plan et les alternatives développés par les nations sans littoral ont fait l’objet d’une note publiée par Florian VINSON sur BSI Economics consultable en cliquant ici.

Les pays enclavés dotés d’une force naval :

Qu’il s’agisse d’une présence maritime symbolique, d’une existence empirique, d’une flotte marchande, scientifique, sportive ou militaire, les pays sans frontière maritime peuvent tout de même disposer d’une force navale, ou plus précisément d’une marine fluviale dans le cadre de missions régaliennes de lutte contre le narcotrafic ou l’immigration illégale.

Selon les cas, ces pays peuvent disposer de plan d’eau, de conventions avec des Etats alliés ou d’accords sur un fleuve, un lac ou une mer fermée.

Il n’est donc pas si absurde que des pays enclavés disposent d’une force marine composant leur armée.

L’Azerbaïdjan :

La marine azerbaïdjanaise opère en mer caspienne (mer fermée) depuis 1919. Elle est composée de plus de 30 navires, 6 aéronefs et 14 000 marins.

Elle est considérée comme la deuxième marine la plus puissante de la mer caspienne après la flotte russe.

Le Kazakhstan :

Les forces navales kazakhes sont composées de 3000 marins, de 17 navires et de 14 aéronefs.

Elle a été créée en 1993 et opère également en mer caspienne.

La Bolivie :

Malgré la perte de son accès au littoral en 1879 pendant la guerre du Pacifique, la marine bolivienne opère principalement sur les rivières affluentes de l’Amazone pour lutter contre le trafic de drogues.

Elle est également présente sur le lac Titicaca qu’elle partage avec le Pérou.

Elle est composée de 173 navires et de 2 aéronefs armés par 5000 marins.

Chaque année, à l’occasion du Jour de la Mer, la Bolivie demande à récupérer les côtes perdues durant la guerre du Pacifique.

La Mongolie :

Au XIIIème siècle, la marine mongole était la plus grande du monde. A ce jour, la Mongolie n’a quasiment plus d’armée. Sa sécurité nationale dépend surtout de la diplomatie vu le rapport de force qu’elle entretien avec les autres nations.

Aujourd’hui, une petite armée est déployée sur le territoire mongol, une armée de terre et des forces aériennes, mais aussi un petit corps de marine. Cette marine mongole se compose de seulement 7 hommes qui arment le navire Sukhbaatar III posté sur le lac Khövsgöl, le deuxième plus grand du pays.

Sukhbaatar III, la Marine Mongole résumée en une seule image

Sukhbaatar III est un remorqueur (les numéros I et II reposent en paix au fond du lac) qui sert surtout à transporter des marchandises entre les rives nord et sud (une journée de bateau contre quatre jours de cheval car il n’y a pas de route). C’est un vaisseau qui fait quelques patrouilles, un peu dans le vide, mais qui a le mérite d’exister.

La Suisse :

La Suisse a effectivement une force navale du fait que d’importants tronçons de la frontière suisse sont formés par des étendues d’eau ou les traversent, et pratiquement toutes les grandes agglomérations sont situées sur les rives d’un lac ou d’un fleuve.

C’est la Compagnie de canots à moteur 10 de l’armée suisse qui est composée de fusiliers de bord et de quatorze canots patrouilleurs pour la protection des eaux frontalières, la surveillance des eaux intérieures, et pour l’appui militaire divers.

En Suisse, l’idée n’est pas de se défendre contre ses voisins français ou italien, mais plutôt d’être en mesure d’apporter leur soutien, à tout moment. Les années 2000 ont par exemple enregistré une demande plus forte en matière de soutien, notamment pour assurer la sécurité du G8 organisé à Evian en 2003, ou encore celle du sommet de la francophonie à Montreux en 2010.

Le Paraguay :

La marine paraguayenne est chargée de défendre les ressources en eau du pays. Il s’agit d’une marine fluviale qui a pour principales missions la garde et la défense des côtes, des ports et des zones d’intérêt fluvial dans sa zone d’influence et de coopération en cas de catastrophes naturelles et de protection de l’environnement.

Elle est composée d’environ 5000 marins qui ont la charge d’une cinquantaine de navires (de patrouilleurs à corvettes) et de 7 aéronefs.

D’autres pays enclavés disposent d’une marine ou d’une force navale, dès lors qu’il existe un intérêt géographique, économique et politique, ainsi qu’un environnement propice pour sa protection.

D’autres ont fait le choix d’abandonner purement et simplement leur force navale, comme l’Autriche qui a définitivement renoncé à sa Marine en 2006. Elle a cédé au Musée d’histoire militaire de Vienne ses deux derniers patrouilleurs qui opéré sur le Danube pour contrôler les navires marchands en provenance d’Europe de l’Est. Le principal bateau autrichien était le patrouilleur Niederösterreich, pesant 70 tonnes et armé d’une mitrailleuse et d’un mortier. Au total, la marine autrichienne ne comprenait qu’une cinquantaine de personnes.

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