La superstition des marins concerne de bien nombreux domaines et de multiples contextes : le mauvais temps, les naufrages, une mauvaise capture de poisson, un décès en mer, un voilier encalminé, parfois provoqué par un “Jonas” à bord, ou un mot qui n’aurait pas dû être prononcé.
Il y a autant de superstitions chez les marins que de jours qui nous séparent du premier homme à avoir posé le pied sur un navire.
Sans GPS, sans maîtrise des éléments, sans parfaite connaissance de la météo et des cartes marines, les marins ont créé leur propre code de conduite, régi par la superstition.
En voici 10, méconnues du grand public et particulièrement étranges, qu’il vaut mieux connaître pour éviter toute situation malencontreuse à bord :
Toujours embarquer avec le pied droit :
La légende raconte que le fait de monter à bord avec le pied gauche porte malheur pour le voyage à venir.
Ceci dit, les deux pieds peuvent porter malheur si le capitaine vous surprend en train de monter à bord avec vos chaussures.
Verser du vin sur le pont pour porter bonheur lors d’un long voyage :
Il n’est pas indispensable de déverser du Romanée-Conti, mais Neptune ne s’apprivoise pas non plus avec de la piquette. En tout état de cause, il est d’usage de partager le breuvage avec le navire (sur le pont) et avec la mer (par dessus bord).
Attention, si le navire est mis à l’eau pour la première fois, c’est sur la proue du navire qu’il est d’usage de faire éclater une bouteille de vin ou de champagne après sa bénédiction.
Ne jamais trinquer avec les verres :
Lorsqu’ils boivent, les marins ont interdiction de choquer les verres entres eux, et doivent à la place trinquer poing contre poing. Car malheur à celui qui oubliera que le bruit du verre attire le vent.
Appareiller un vendredi et le premier lundi d’Avril porte malheur :
Il s’agit de l’une des superstitions marines les plus universelles, qui trouve son origine dans la crucifixion du Christ un vendredi, et donc signe de mauvais présage.
Néanmoins, on explique aussi cette superstition par le fait que les marins étaient traditionnellement payés le jeudi, et de nombreux matelots qui dépensaient leur paie en alcool n’avaient pas retrouvé leur sobriété nécessaire lors de l’appareillage du lendemain. D’où un nombre d’accidents plus élevé.
Même Jean Parmentier, navigateur français qui devait appareiller le vendredi 2 avril 1529 pour la première expédition française vers l’Extrême Orient depuis Dieppe, a repoussé le départ au lendemain alors que les vents étaient favorables.
De même, il ne faut jamais commencer un voyage le premier lundi d’avril car c’est le jour où Caïn a tué Abel.
Jeter des pièces de monnaie lorsqu’on quitte le port :
Les pièces de monnaie jetées à la mer lorsqu’un navire appareille constituent un petit tribut à Neptune, pour un voyage sans encombre, tout comme le vin versé par dessus bord.
En revanche, une pierre jetée depuis un navire qui prend la mer garantit qu’il ne reviendra jamais.
Les fleurs portent malheur à bord :
La légende raconte que les fleurs à bord sont vecteur de malheur car elles peuvent être utilisées pour confectionner une couronne pour les morts.
Aujourd’hui, c’est presque l’inverse, surtout dans le yachting : c’est le fait de ne pas avoir de fleurs à bord qui est synonyme de danger pour l’équipage, car le propriétaire pensera qu’il ne fait pas son travail. Vous n’aurez donc qu’à répondre qu’elles portent malheur.
Cigarettes et bougies :
Allumer une cigarette à l’aide d’une bougie provoquerait la mort d’un marin quelque part dans le monde.
Cette superstition est particulièrement tarabiscotée : l’association des Hospitaliers Sauveteurs Bretons (ancêtre de la SNSM créée en 1873) avaient pour habitude de vendre des allumettes dont les bénéfices étaient utilisés comme dons au profit de l’association.
Ainsi, le fait d’allumer une cigarette à la bougie revenait à priver l’association de dons à la HSB, contribuant ainsi au manque de moyen pour venir en aide aux marins en détresse.
De plus, Les femmes des marins avaient pour habitude d’allumer des bougies lorsque leurs maris partaient en mer pour qu’ils retrouvent le chemin du foyer. Allumer une cigarette avec une bougie risquait donc d’éteindre la flamme, ce qui arrivait lorsque le mari ne revenait jamais.
Tuer le macoui avant de rebaptiser un navire :
Le macoui est un grand serpent marin qui protège le navire et qui se confond avec son sillage. Et chaque navire a un macoui qui le protège, au même titre qu’un Klabautermann.
Rebaptiser un navire revient à lui attacher un nouveau macoui, et les deux divinités entrent alors en compétition et se battent, ce qui peut provoquer des accidents par la suite en mer, d’où la raison pour laquelle il n’est pas de bon augure de renommer un navire.
Sauf si l’on tue le macoui avant. Pour cela, le navire doit sortir au large et l’équipage doit boire quelques verres sans oublier sans oublier d’en verser pour Neptune, témoin, et dans le sillage pour saoûler le macoui afin de l’affaiblir. Il faut ensuite couper sa propre vague par 3 fois pour débaptiser le navire et ainsi tuer la divinité marine. Il faut ensuite prononcer le nouveau du navire à haute voix en versant à nouveau de l’alcool sur le nouveau macoui.
Les mots “prêtre”, “recteur”, “moine”, “église”, sont banni à bord :
Parmi les mots interdits à bord, il y a le plus connu qu’on préfère nommer “la bête aux grandes oreilles” pour désigner le lapin.
Mais les mots “prêtre“, “recteur“, “moine“, “église“, “curé” sont également bannis depuis le XXème siècle, en raison des controverses dont ils font l’objet, et les divisions qu’ils créent parmi les équipages français.
Certains estiment que la couleur noire de la robe porte malheur, d’autres que la robe en elle-même rappelle la présence d’une femme alors qu’elles étaient interdites à bord.
Pour éviter tout désagrément, les équipages ont remplacé ces mots par le terme “cabestan” pour les désigner.
Pour ces mêmes raisons, les avocats ne sont pas les bienvenus à bord, car la robe rappelle justement celle du curé et tout ce qu’elle évoque (malgré le fait qu’il n’y a aucune raison qu’un avocat porte une robe à bord d’un navire).
Interdiction de siffler à bord, sauf pour le Maître Coq :
Les marins considèrent que siffler fait venir le vent, voire la tempête. Même par temps calme, il n’était pas de bon augure que les marins sifflent, contrairement au chant recommandé pour éviter d’entendre celui des sirènes. Cette superstition est très présente chez les marins russes, québécois et anglais.
En revanche, seul le Maître Coq (cuisinier) était autorisé à siffler, car cela signifiait qu’il ne s’attaquait pas aux provisions.
Si vous en avez d’autres, n’hésitez pas à les poster en commentaires !