
Le commandement pour un Officier de Marine est le commandement à la mer. Cette formalité, très officielle, s’effectue au travers d’une lettre de commandement signée par le Président de la République qui le désigne pour commander à bord d’un bâtiment. Il devient alors seul maître à bord après Dieu.
Jean-Louis TOURBIER, qui commanda La Belle-Poule de 1995 à septembre 1997, a eu ses mots au sujet du commandement dans la Marine Nationale :
“Commander un navire est le rêve plus ou moins secret et tant recherché de tout officier de marine. C’est le but d’une carrière, c’est l’aboutissement de tant d’efforts. C’est un privilège avant tout, car être désigné par le Président de la République pour commander un navire et à des hommes est un honneur. Qui plus est, comme on le souligne de plus en plus souvent dans la Marine nationale, il n’y a pas assez de “passerelles” pour tous ! Le rêve ne reste que rêve pour beaucoup d’entre nous.”
Il rajouta, à propos de son commandement à bord de la Goélette :
“Commander La Belle-Poule ce n’est pas en être le maître. Il faut apprendre à la connaître, il convient de l’apprécier et de savoir à chaque instant ce que l’on peut lui demander, on se doit de la respecter. C’est aussi la séduire, puis l’aimer. Il faut vivre avec elle, l’écouter sur l’immensité océane, au gré des coups de vents ou des calmes plats, la mener au cœur des dépressions ou en bordure des anticyclones, il faut l’aider à se frayer un chemin, écouter ses plaintes et la soulager.
Une symbiose entre le commandant et son navire apparaît peu à peu, des liens affectifs se tissent, presque des liens amoureux.
Une épouse non, une maîtresse presque, une amie chère sûrement.
Tout ceci ne rend pas la vie de famille facile. Mon épouse, Nathalie, aurait parfois eu l’occasion d’être jalouse de “ma Poule”. Pendant deux ans elle semblait être sa concurrente. Il est vrai que “ma goélette” m’a pris beaucoup de mon temps et a accaparé sans doute plus que de raison mon esprit. Il n’est pas une journée, à la mer bien sûr mais aussi le soir à la maison, le dimanche en famille, et même pendant nos vacances alors que nous naviguions sur notre voilier familial, où je n’ai eu une pensée pour “ma fière vieille demoiselle” comme j’aimais à la nommer. Il n’est pas un jour ou je n’ai évoquer avec mon épouse les joies et les difficultés de cette vie commune. Deux ans de vie à trois tous comptes faits !
La Belle-Poule, une fiancée de deux ans ? Probablement après tout. Et maintenant qu’un autre prétendant s’occupe d’elle, fille infidèle qui m’a tant donné, je vis une séparation douloureuse, presque une déchirure.”
Ce témoignage émouvant, presque bouleversant, peu à quelques particularités près s’appliquer à chaque bâtiment. Évidemment, une Goélette n’est pas un Chasseur de Mine, ni un bâtiment ravitailleur, encore moins une Frégate ou un Porte-Hélicoptère Amphibie. Il n’en demeure pas moins ce point commun du commandement à la mer qui marque au fer rouge l’esprit de ceux qui ont l’honneur d’en avoir la charge.
Le commandement d’un bâtiment militaire n’est pas exclusivement réservé aux officiers de Marine. Des Officiers Mariniers peuvent s’en voir attribuer la mission, souvent pour des bâtiments de plus petites dimensions comme des patrouilleurs.
Il n’est pas non plus obligatoire d’être Officier Supérieur (Capitaine de Corvette, Capitaine de Frégate ou Capitaine de Vaisseau) pour être à la tête d’un navire. Un lieutenant de vaisseau (Officier Subalterne) peu tout à fait commander à la mer sur des bâtiments tels que des Chasseurs de Mines.
Le commandement : une décision présidentielle
Dans l’armée, et en particulier au sein de la Marine Nationale, on ne demande pas l’avis du prétendant sur ses nouvelles missions. On le nomme et il s’exécute.
C’est la raison pour laquelle une lettre de commandement est formulée ainsi :
“Le Président de la République, par décision … , désigne … pour commander … à compter du jour de la prise de commandement, et ordonne à tout le personnel ainsi placé sous ses ordres de lui obéir en tout ce qu’il lui commandera pour le bien du service, l’exécution des règlements militaires, l’observation des lois et le succès des armes de la France“.