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Le concept de Port du Futur est-il compatible avec les ports de plaisance ?

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Depuis la loi de 2008 portant réforme portuaire, les ports ont changé de métier.

Leur rôle n’est plus d’assurer le chargement et déchargement des navires, mais d’être des acteurs et moteurs du développement durable, d’aménagement du territoire, de la croissance et de l’emploi en intégrant désormais de nouvelles prestations de service aux armateurs, équipages, usagers et clients, et sont au coeur du concept de la Croissance Bleue.

En revanche, bien que cette réforme ne concernait que les ports autonomes (transformés en Grands Ports Maritimes – GPM), à savoir Marseille, Le Havre, Dunkerque, La Rochelle, Nantes Saint-Nazaire, Bordeaux et Rouen, la question de la relance des autres ports français de pêche ou de plaisance en tant qu’enjeu économique et social se posait tout autant. Ces autres ports, capables de générer à eux-seuls un chiffre d’affaire important et de faire vivre quasiment une région entière, ont su capter l’attention de certains qui voyaient dans ces infrastructures un potentiel non négligeable de croissance et d’emplois.

Le transport maritime et l’activité portuaire qui en découle sont des indicateurs « anticipateurs » sur l’état futur de l’économie. Adapter ses capacités d’accueils, supprimer les ports « cul de sac », optimiser l’aspect multimodale et dynamiser et diversifier ses services pour améliorer toujours plus sa compétitivité, c’est s’engager en premier lieu sur le chemin de la croissance et de l’emploi.

D’où le concept, depuis plusieurs années, d’un Port du Futur pour les grands ports de commerce, qui consiste à l’aménagement du littoral pour des ports plus propres, plus autonomes, plus sûrs, mieux adapté aux flux et aux demandes des usagers.

La notion de port du futur (qui concerne en particulier les GPM), envisage des innovations attendues dans la gestion des données, la connectivité des usagers, l’amélioration des flux de marchandises, la sécurité, la recherche de nouvelles synergies en terme d’écologie industrielle et d’économie circulaire (produire des biens et services en limitant fortement la consommation et le gaspillage des matières premières), les énergies renouvelables, l’amélioration des liens ville-ports.

Certains ports sont déjà dans le futur : le port plaisance de Larmor-Plage de Kernevel (Morbihan) par exemple travaille actuellement sur un projet de connectivité avec le plaisancier grâce à une technologie embarquée sans contact : l’usager réservera son emplacement avec son mobile, prendra son anneau, accèdera à aux infrastructures du port, sans badge ni clef. Et le gestionnaire pourra gérer les places et la maintenance à distance.

Sur la Côte d’Azur, une société s’investie depuis 2013 ans avec succès dans ce nouveau mode d’accès pour le plaisancier vers sa place de port. La société niçoise Navily a réussi à prendre le tournant digital de l’économie maritime et numérique et propose aux plaisanciers qui ont l’application sur leur smartphone de trouver des mouillages organisés, des mouillages forains et de réserver désormais sa place de port.

L’application est conçue à la base comme un véritable réseau social dans lequel les plaisanciers, après s’être identifiés (avec les caractéristiques du navire), se géo-localisent en mer aux abords d’une plage, d’une crique, ou d’un mouillage, identifie celui-ci et précise quels sont les fonds (sable/algues/roche/vase), s’il y a des commerces à proximité, des points d’eau, l’exposition et la protection de ce mouillage par rapport au vent et à la houle, partagent une ou plusieurs photos de celui-ci, le note et y ajoute un commentaire. Le succès de ce réseau social a permis très rapidement à la communauté maritime méditerranéenne de découvrir de nouvelles zones sur lesquelles naviguer et trouver les meilleurs mouillages situés autour de soi, quelle que soit sa zone de navigation.

Navily a été précurseur dans la contribution du développement de la compétitivité des ports de Méditerranée, en permettant aux usagers de l’application de réserver une place de port, en les informant des tarifs d’une nuitée selon la longueur du navire, des services portuaires proposés, et de la notation du port par les plaisanciers, bref, un TripAdvisor de la mer. Il n’y a rien de plus sévère pour les hôtels, les restaurants et les prestataires de services touristiques que TripAdvisor, au grand bonheur des clients, vu que l’application propose aux clients de noter et commenter le service acheté, et incite plus que jamais les acteurs du tourisme à améliorer leur compétitivité.

Navily est par extension un TripAdvisor pour les ports et les mouillages, et en cela, les entrepreneurs niçois à la tête de Navily incitent les ports de plaisance à s’améliorer pour devenir peu à peu les ports que l’on souhaite voir à l’avenir : une nouvelle gestion des données administratives et commerciales, une connectivité facile et rapide des usagers, et côté gestionnaire, une amélioration des flux, avec plus de facilité administrative par la dématérialisation des données, plus de sécurité, etc.

La notion de port de futur, telle qu’on l’imagine pour les grands ports de commerce est-elle compatible avec les ports de plaisance ? La réponse est évidemment oui.

Les ports de plaisance n’ont pas le choix d’intégrer les nouveaux modes d’interactions et de gestions numériques s’ils veulent améliorer leur qualité d’accueil.

De même pour les ports de pêche qui doivent en partenariat avec les criées, les marchés ou les étales de vente, se mettre à l’heure de la gestion numérique afin d’améliorer la visibilité de leurs cargaisons et produits de vente aux clients en cherchant à aider le consommateur à choisir et réserver son poisson avant de se rendre sur les lieux, par exemple.

Le port du futur, c’est un périmètre multidimensionnel et encadré, qui doit s’adapter aux évolutions sociétales, environnementales, économiques, techniques, et prendre également en compte l’accueil des navires du futur. Le port du futur doit également développer les liaisons villes-ports, inciter à utiliser ses infrastructures qu’il devra adapter en diversifiant ses prestations de service, à revoir son agencement. Proposer une diversité d’offres sur le port en fonction du flux des touristes par exemple.

Les clefs de l’innovation reposent donc sur la conception et l’usage des ouvrages maritimes, la réorganisation des méthodes de gestion opérationnelle des ports, la maîtrise des flux maritimes et terrestres, et l’intégration environnementale, car le Port du Futur, qu’il soit GPM ou de plaisance, doit aussi être durable, et tenir compte des effets du changement climatique. Nous sommes véritablement qu’à la phase de compréhension des phénomènes liés au changement climatique. Pour les ouvrages portuaires, comme d’ailleurs pour tous les ouvrages de défense du littoral, il y a un gros travail d’analyse, de simulation et de définition de mesures préventives à mettre en place.

Des concepts portuaires innovants doivent ainsi émerger et permettre la maîtrise d’un développement d’activités économiques et sociales nouveau, adapté, et intégrant les acteurs régionaux de la croissance bleue.

La notion de Port du Futur évoque donc les nouvelles technologies et l’utilisation de systèmes informatiques qui viennent appuyer une logistique plus performante, c’est un port connecté, plus sûr, dont les flux d’informations sont dématérialisés. Les Grands Ports Maritimes vivront forcément cette métamorphose, et la Plaisance doit à tout prix s’en inspirer.

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